L’Assemblée Nationale a définitivement adopté le droit voisin au profit des éditeurs de presse, faisant ainsi de la France le premier pays à retranscrire en droit national la Directive européenne l’ayant instauré. Revue de détail.
C’est par 81 voix pour et 1 voix contre, que l’Assemblée Nationale a adopté en 2ème lecture le 23 juillet la loi instaurant le droit voisin au profit des éditeurs de presse en ligne et des agences de presse. Ce droit avait été créé, après d’âpres débats, par une Directive européenne au printemps dernier. Rappelons le principe : les agrégateurs et les réseaux sociaux devront désormais rémunérer les éditeurs de presse et les agences de presse quand ils réutiliseront une publication de presse dans un service de communication au public en ligne. Une petite révolution puisque les GAFA jusqu’alors avaient pris l’habitude d’utiliser ces publications de presse sans verser aucune contrepartie à leurs auteurs. Mais une petite révolution qui n’est rien d’autre qu’une application logique du droit d’auteur.
La notion de publication de presse
Il convient avant tout de s’entendre sur ce qu’est une publication de presse. Dans son article 4, la loi la définit comme « une œuvre littéraire de nature journalistique« , tout en précisant qu’elle peut inclure des photos et des vidéos. Désormais, les publications de presse seront donc valorisées et pour une durée de 2 années à compter du 1er janvier de l’année suivant leur première publication. Au-delà, plus aucune rémunération ne sera exigible.
Le texte de loi prévoit dans son article 2, des exceptions. Ne seront ainsi pas concernés les liens hypertextes, les « très courts extraits » et les mots isolés.
Une autorisation préalable
Un agrégateur, tel que Google News par exemple, ne pourra pas réutiliser une publication de presse sans une autorisation préalable de l’éditeur de presse. Bien entendu, cette autorisation ne se fera pas au coup par coup, mais reposera sur des accords de type licences.
Une rémunération à définir
Les modalités de cette rémunération restent à définir, ce qui promet des discussions sans doute serrées avec les GAFA, discussions qui seront d’autant plus avantageuses pour les éditeurs européens qu’ils sauront parler d’une même voix…
Aujourd’hui de nombreux points restent à fixer, tels que l’assiette de la rémunération, son taux, ses bénéficiaires. Reste aussi à choisir un organisme collecteur. Plusieurs organismes de protection des droits d’auteur se sont déjà positionnés.
La loi propose des critères qui serviront de guides aux négociations à venir : les investissements humains, matériels et financiers engagés par les éditeurs ou les agences de presse, la contribution à l’information générale et politique ou encore l’importance de l’utilisation des publications de presse par les services de communication au public en ligne.
Les journalistes et auteurs ne seront pas oubliés
En effet, le texte de loi stipule : « Ont droit à une part appropriée et équitable de la rémunération » les journalistes et auteurs des publications réutilisées. Cette part devra être négociée dans un accord d’entreprise ou un accord collectif.
On le voit, tout n’est pas encore réglé, mais la France montre la voie. Face aux GAFA, un front uni européen est nécessaire pour diminuer le risque de voir les grands agrégateurs et les réseaux sociaux … bouder la presse française et européenne, ce qui n’était évidemment pas l’objectif recherché! A suivre…
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